La Loi du 12 novembre 2004 sur la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme (« Loi AML ») s’applique à un certain nombre de professionnels, dont les « prestataires de services aux sociétés et fiducies » (« PSSF »).
Les PSSF sont actuellement définis dans la Loi AML comme suit (article 1er (8) Loi AML):
toute personne physique ou morale qui fournit, au titre d’une relation d’affaires, l’un des services suivants à des tiers :
a) constituer des sociétés ou d’autres personnes morales ;
b) occuper la fonction de « directeur », de gérant, d’administrateur, de membre du directoire » ou de secrétaire d’une société, d’associé d’une société « de personnes » ou une fonction similaire à l’égard d’autres « types de » personnes morales, ou faire en sorte qu’une autre personne occupe une telle fonction ;
c) fournir un siège statutaire, une adresse commerciale, administrative ou postale « ou des locaux professionnels et le cas échéant, tout autre service lié à une société, à une société « de personnes », à toute autre personne morale ou à toute autre construction juridique similaire ;
d) « occuper la fonction de fiduciaire dans une fiducie, la fonction de trustee dans un trust exprès ou une fonction équivalente dans une construction juridique similaire, ou faire en sorte qu’une autre personne occupe une telle fonction ; « e) « faire office d’actionnaire pour le compte d’une autre personne (…) ou faire en sorte qu’une autre personne occupe une telle fonction. »
L’Administration de l’Enregistrement et des Domaines (l’AED) est l’autorité de contrôle pour effectuer des contrôles sur place auprès des PSSF (article 2-1 Loi AML).
La jurisprudence a eu l’occasion de donner quelques précisions sur la définition des PSSF (Tribunal Administratif 29 mars 2022 n°45002).
Dans cette affaire, l’AED avait effectué un contrôle sur place d’un espace de co-working et constaté différents manquements à la Loi AML et avait prononcé une amende.
La société exploitant cet espace de co-working avait contesté cette amende devant le tribunal en estimant ne pas tomber dans le champ d’application de la Loi AML.
Le tribunal avait d’abord constaté que l’espace co-working en question exploitait un centre d’affaires qui propose la location de bureaux privatifs et la location d’espaces « CO-WORKING » répartis sur trois centres d’affaires. Parmi les services proposés, le centre d’affaire facturait « la réception et la réexpédition du courrier ».
Le tribunal avait d’abord relevé que la simple conclusion d’un contrat de bail commercial n’équivalait pas nécessairement à la fourniture d’un siège social ou d’une adresse commerciale, administrative ou postale, si la conclusion du contrat de bail n’était pas accompagné d’autres services qui vont au-delà de la simple location (mise à disposition d’un secrétariat, accueil communs, etc..) (dans le même sens Cour Administrative 26 octobre 2021 n°45967C). L’utilisation des parties communes et le réseau « Wifi » sont, selon le tribunal, des accessoires au contrat de bail qui ne vont pas au-delà de la simple location.
Le tribunal a ensuite analysé si les services liés au courrier pouvaient être qualifiés de « tout autre service lié à une société ». le tribunal a estimé que le service en question doit « contribuer de manière active au fonctionnement statutaire même d’une société, service sans lequel la société ne pourrait pas fonctionner, à l’opposition de tout service généralement quelconque simplement « utile » à l’activité de la société.
Le tribunal a constaté que l’espace co-working a fourni et facturé de manière limitée, pendant une durée prolongée de plusieurs mois, un service de réception et continuation des envois recommandés, et colis adressés à différentes sociétés ayant pris en location des bureaux dans son centre d’affaires, contre facturation. Un tel service de réexpédition des courriers et des colis doit être considéré comme service lié à une société, au sens de la Loi AML, dans la mesure où il est de nature à contribuer de manière active au fonctionnement statutaire même d’une société, service sans lequel la société ne pourrait pas fonctionner.